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Wednesday, December 26, 2007

***FEMMES : L'art de s'adapter au pouvoir...***

***Cécilia, Carla et Hillary : trois premières dames et trois façons de composer avec les codes de la fonction. L'époque où les femmes de pouvoir étaient "des hommes comme les autres" est bel et bien terminée, affirme La Vanguardia.

J'éprouve une intense curiosité pour cette femme imprévisible. Cécilia Ciganer-Albéniz a été la première dame la plus fugace et sans aucun doute la plus surprenante de l'histoire présidentielle française. "Qu'aller-vous faire dans les jours qui viennent ?" lui demanda un journaliste de l' Est républicain. "Me projeter dans l'avenir", répondit-elle, en ajoutant : "Je n'aime pas vivre dans les décombres." La solidité de ses réponses, résumées en une phrase essentielle ("Les Français ont élu un homme pas un couple"), mettait à nu la plainte d'une femme qui ne voulait pas s'exposer et souhaitait protéger sa vie, sauf que c'était le pire endroit et le pire moment pour y parvenir.

L'œil de la République ne pouvait cesser d'observer le réjouissant spectacle d'une première dame rebelle. Et c'est ainsi que, dans le style des grandes dames maudites de l'histoire de France, elle a abandonné son époux et tenté de remettre les compteurs à zéro. Elle ne voulait pas que sa vie privée soit disséquée au vu et au su de tous ("Il n'y a pas de carapace assez solide pour se protéger de cela"), même s'il est difficile de concevoir qu'elle retombe dans l'anonymat qu'elle recherche, il ne fait aucun doute qu'elle a pris la bonne décision.

La France est, de plus, le pays du monde qui prend le plus au sérieux la protection de l'intimité. Si la question de l'équilibre personnel de Cécilia s'était posée dans un pays comme l'Espagne, où la presse du cœur l'aurait littéralement écorchée vive, on n'ose imaginer les conséquences. Quelque chose fonctionne bien dans la bonne vieille République française.

Si Cécilia a été la première dame a abandonner le navire, et cela en haute mer, Hillary, pour sa part, a décidé de rester à bord lorsque le vaisseau menaçait de sombrer. A l'époque, les spécialistes de la cuisine politique washingtonienne considérèrent que le rôle endossé par Hillary fut ce qu'il y avait à faire de plus intelligent pour se maintenir en politique. Au-delà du fait que ce couple a réussi à sauver son mariage, il s'agissait d'une question de stratégie. Les Etats-Unis sont en effet un des pays démocratiques les plus contradictoires qui soient et la question féminine n'échappe pas à cette règle. Ils occupent le 67e rang en matière de féminisation de la représentation parlementaire, juste derrière le Zimbabwe. Cependant, une femme noire est actuellement secrétaire d'Etat, Nancy Pelosi préside le Sénat et Hillary Clinton est une candidate crédible au poste de présidente des Etats-Unis.

Mais il lui a fallu pour cela accepter l'adultère, jouer avec abnégation le rôle de l'épouse, être capable de pardonner. Voilà ce qui a permis à Hillary de rester dans la course. Si une première dame telle que Jacqueline Kennedy a su apprendre aux Américains à bien mettre la table et à s'habiller avec élégance, une autre première dame les a convaincus qu'ils avaient tous en eux quelque chose de Jacky. Et aujourd'hui, elle a pu passer du rôle de première dame à celui de première femme capable de présider le pays.

Entre ces deux femmes se glisse la figure de Carla Bruni, qui assume un rôle très lié à l'histoire de la politique française, celui de maîtresse du président. La différence, c'est qu'elle ne vit pas ses amours dans la clandestinité et que lui n'est plus marié. Si Hillary incarne l'évolution dans la continuité et Cécilia le droit à la rupture, Carla, elle, est une authentique postmoderne. A elles seules, elles font mentir l'adage selon lequel les femmes de pouvoir seraient des hommes comme les autres. L'époque des Thatcher est bel et bien terminée.

Pilar Rahola
La Vanguardia
Courrier International

26 déc. 2007

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