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Wednesday, December 12, 2007

*"Rayez-nous de la carte !"...: ROYAUME-UNI*



***La généralisation des GPS conduit de plus en plus souvent de gros camions à traverser de petits villages et parfois d'y rester coincés. Au point que certains villages souhaitent disparaître des cartes, relate l'International Herald Tribune.

DE WEDMORE, ANGLETERRE

De toute évidence, ce village est bien trop petit pour les gros camions. Ses rues ont été conçues au temps des chevaux et des charrettes ; elles ne permettent ni de passer, ni de manœuvrer, mais rien n'y fait : régulièrement, des semi-remorques tentent de traverser Wedmore et d'autres localités britanniques totalement inadaptées à la circulation de tels engins. Pour cela, ils se laissent guider par des GPS qui ignorent que l'itinéraire le plus court n'est pas forcément le meilleur.

"Les chauffeurs n'ont pas la moindre idée d'où ils se trouvent", explique Wayne Hahn, un commerçant du coin qui voit chaque jour son lot d'accidents – barrières heurtées, rétroviseurs arrachés, véhicules qui se retrouvent coincés en bas de la colline de Wedmore. Les villageois ne savent plus que faire, si bien que John Sanderson, président du conseil municipal, a proposé une solution apparemment simple : exclure l'itinéraire passant par Wedmore des récepteurs GPS qu'utilisent les poids lourds.

"Il faudrait que les routiers soient équipés de systèmes leur indiquant que certains itinéraires ne conviennent pas à ce type de véhicules", dit Sanderson. Il précise qu'il n'ira pas jusqu'à faire enlever Wedmore de la carte. Mais des communes qui se trouvent dans la même situation – et elles sont des centaines, la Grande- Bretagne regorgeant de petits villages tout aussi inadaptés au passage des gros camions – trouvent que ce serait une excellente idée.
"En fait, nous leur avons demandé de nous retirer de la carte, purement et simplement", explique Geoff Coombs, président du conseil municipal de Barrow Gurney, un village que traversent chaque jour quelque 15 000 véhicules – voitures et poids lourds –, alors qu'il est trop petit pour avoir des trottoirs. Or, d'après le GPS, il constitue un bon itinéraire de délestage pour se rendre à l'aéroport de Bristol.

Ne plus être sur la carte ? C'est plus facile à dire qu'à faire. "Nous cartographions la réalité – les rues, les poteaux indicateurs et l'infrastructure routière - telle qu'elle est sur le terrain", fait valoir Dick Snauwaert, de Tele Atlas, une société qui fournit des cartes numériques destinées aux systèmes de navigation portatifs. Snauwaert estime que c'est aux collectivités locales de préciser quelles sont les routes inadaptées à la circulation des camions et d'installer les panneaux nécessaires. Ensuite de quoi, les informations utiles, concernant par exemple la hauteur, la largeur ou les contraintes de poids, pourront être intégrées aux bases de données utilisées par les appareils GPS.

Il faudra peut-être des mois, voire des années, pour passer à la prochaine étape : mettre au point des récepteurs GPS spécifiques pour les camions, qui prennent en compte ces nouvelles données. Mais les autorités locales travaillent à les réunir. "Une fois que nous aurons les bonnes informations, nous pourrons commencer à changer les itinéraires des poids lourds", assure Richard Matthews, chargé de l'aménagement routier au conseil de comté du Somerset, qui prône une action à l'échelle nationale. Grâce à une enquête réalisée auprès des autorités locales, ce comté a constaté que 82 % des communes avaient des problèmes de circulation liés au GPS.

Certaines communes ont commencé à installer des panneaux pour inciter les conducteurs à ne pas se servir de leur récepteur GPS sur les routes de campagne. Mais, apparemment, ils l'utilisent de plus en plus, oubliant les cartes, leur bon sens et leurs yeux. "Nous avons entendu des histoires hilarantes de gens qui suivent aveuglément les instructions du GPS", raconte Vince Yearley, de l'Institute of Advanced Motorists [une association d'automobilistes qui promeut la sécurité routière]. "Si le GPS leur dit : ‘Prenez ce chemin boueux', ils se disent ‘C'est bizarre', mais ils y vont quand même."

En ce qui concerne les poids lourds qui se perdent, ce genre de mésaventures arrivent surtout à des conducteurs étrangers. Le mois dernier, un poids lourd slovaque est arrivé à Douvres. Il transportait 22 tonnes de papier qu'il devait livrer au pays du Galles. Mais son système de navigation l'a invité à quitter la route principale pour s'embarquer dans des routes de plus en plus étroites, et il a fini par se retrouver coincé entre deux maisons, dans une petite allée du village de Mereworth (Kent). Le chauffeur est descendu de sa cabine et a éclaté en sanglots.
"Il a bien essayé de manœuvrer pour se sortir de là", a raconté Mark Siggers, un habitant, à un journal local. "Mais il commençait à racler les murs des façades." Il a fallu plusieurs jours aux autorités pour dégager son camion, qui est maintenant déchiqueté.

Sarah Lyall
International Herald Tribune
Courrier International


*Photo : A Wedmore
AFP

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